Nous sommes en 1986 et le dernier album en date de Bonnie RAITT remonte, mine de rien, à 1982. La chanteuse californienne n’avait pas démérité sur Green Light, mais elle n’a pas encore atteint le Saint-Graal. Donner un successeur à Green Light a d’ailleurs été compliqué pour elle. Le successeur de cet album était au départ supposé avoir comme titre Tongue & Groove et voir le jour en 1983, mais la maison de disque Warner Bros. exigeait de Bonnie RAITT qu’elle prenne une orientation plus commerciale, ce qui a provoqué des tensions, des conflits entre les 2 parties (il semblerait que la maison de disque ait manqué de franchise envers la chanteuse et a même refusé de la rémunérer).

En fin de compte, Bonnie RAITT a refait l’album qui s’intitule en définitive Nine Lives, en clin d’oeil au 9ème album studio de la native de Burbank. Celle-ci, qui n’est pas au meilleur de sa forme en ce mitan des 80’s, n’a pas écrit un seul titre de ce disque. Elle a été entourée par de nombreux compositeurs extérieurs, ainsi que 5 producteurs (Rob Fraboni, Russ Kunkel, Bill Payne, Steve Tyrell & George Massenburg) pour mener à bien la finalisation de ce disque. Celui-ci sort en 1986 et la première impression, visuelle, n’est pas vraiment de nature à rassurer: on a l’impression que c’est un enfant de l’école maternelle ou au début de l’école primaire qui a dessiné la pochette de ce Nine Lives

Depuis la sortie de Green Light en 1982, le paysage musical a pas mal bougé et Bonnie RAITT tente de coller (plus ou moins) à l’air du temps. Ce 9ème album ne démarre pas si mal que ça, pourtant, avec « No Way To Treat A Lady », une compo Pop-Rock/AOR écrite par Bryan Adams et Jim Vallance qui cadre assez bien avec le contexte de l’époque et qui s’avère de bonne facture avec ses guitares raffinées, son refrain aux petits oignons et une Bonnie RAITT qui chante juste. Hélas, ce morceau constitue en quelque sorte l’arbre qui cache la forêt car la suite de l’album est nettement moins reluisante. Toujours dans le créneau Pop-Rock/AOR, le mid-tempo « Runnin’ Back To Me », qui fut co-écrit par Karla Bonoff, est très convenu, sans grande conviction, Bonnie RAITT manquant de gnaque pour le coup et le résultat est très moyen pour être gentil. L’ennui se fait de plus en plus pressent au fur et à mesure que les titres défilent. Entre Synth-Pop et AOR, « Freezin’ (For A Little Human Love) » est assez barbant, pénible, surtout qu’il contient tous les tics et clichés négatifs de l’époque (la rythmique en carton, en particulier). Dans la catégorie des chansons oubliables, il est trop tentant de mentionner « Stand Up To The Night », « Who But A Fool (Thief Into Paradise) », un morceau entre Soft-Rock jazzy et variété US qui s’avère aussi vaporeux que sirupeux, « All Day, All Night », une compo avec des choeurs aériens, un beat Reggae qui est molle du genou au point de donner envie de dormir, ainsi que la ballade « Crime Of Passion » qui est soporifique et manque vraiment de passion. L’autre ballade du disque, « Angel », possède bien quelques jolies textures de guitares, mais ça ne la fait pas pour autant décoller et elle est, au mieux, quelconque, moins pire que « Crime Of Passion ». Toutefois, s’il fallait décerner la palme du titre le plus faiblard de l’album, celle-ci irait probablement à « True love Is Hard To Find », un morceau aux relents Reggae qui a des allures vaguement exotiques, mais qui ne le fait pas, d’autant que même Bonnie RAITT elle-même ne semble pas y croire. Outre « No Way To Treat A Lady », il se trouve un autre titre sauvable: il s’agit de « Excited », un morceau Pop-Rock/AOR aux relents jazzys qui, à défaut d’être excitant, demeure dans les limites du convenable grâce à un refrain sympa et un solo de saxophone cool.

Il fallait s’y attendre, ce 9ème album de Bonnie RAITT est un échec dans les grandes largeurs. Il faut dire que tous les voyants étaient au rouge pour la chanteuse à l’époque. Nine Lives est un disque sans âme, sous inspiré et la native de Burbank donne d’évidents signes de fatigue, un certain manque de motivation. De nombreux artistes issus des 70’s avaient eu leur(s) disque(s) raté(s) durant les 80’s et, dans le cas de Bonnie RAITT, c’est Nine Lives qui rentre dans cette catégorie. C’est donc fort logiquement que les ventes d’albums ont été en chute libre (l’album s’est classé seulement 115ème aux USA). La carrière de Bonnie RAITT semble à ce moment-là mal embarquée et pratiquement personne ne semble miser sur elle en 1986…

Tracklist:
1. No Way To Treat A Lady
2. Runnin’ Back To Me
3. Who But A Fool (Thief Into Paradise)
4. Crime Of Passion
5. All Day, All Night
6. Stand Up To The Night
7. Excited
8. Freezin’ (For A Little Human Love)
9. True Love Is Hard To Find
10. Angel

Line-up:
Bonnie Raitt (chant, guitare, slide)
+
Bill Payne (piano acoustique, claviers)
Richard Kosinski (claviers)
J.A.C Redford (claviers)
Ian MacLagan (claviers)
Eric Kaz (piano)
Michael Landau (guitare)
Dean Parks (guitare)
Ira Ingber (guitare)
Charles Ferrin (guitare)
David Kitay (guitare, batterie programmée)
Johnny Lee Schell (guitare)
Nathan East (basse)
Neil Stubenhaus (basse)
Leland Sklar (basse)
Ray Ohara (basse)
John Robinson (batterie)
Russ Kunkel (batterie)
Carlos Vega (batterie)
Ian Wallace (batterie)
+
Tower Of Power (saxophone, trompette)

Label: Warner Bros.

Producteurs: Rob Fraboni, Russ Kunkel, Bill Payne, Steve Tyrell & George Massenburg