Pour LITTLE FEAT, le premier album studio sans titre, sorti en 1971, a constitué un premier pas intéressant, encourageant. Il ne fallait toutefois pas se reposer sur ses lauriers et les musiciens se devaient de persévérer pour montrer que ce premier effort discographique n’était pas qu’un simple feu de paille…

Le groupe de Los Angeles, bien décidé à aller de l’avant, entre en studio en compagnie du producteur Ted Templeman, qui s’est fait connaitre en ayant travaillé pour THE DOOBIE BROTHERS, VAN MORRISON et allait faire profiter plus tard de son expérience à des groupes comme MONTROSE, VAN HALEN. Pour revenir à LITTLE FEAT, le groupe emmené par Lowell George mène à bien l’enregistrement de son second album et celui-ci, qui a pour titre Sailin’ Shoes, sort en février 1972.

Ce qui marque d’entrée, c’est cette belle alchimie entre les 4 musiciens qui, de toute évidence, ont gagné en assurance. Le style dominant sur cet album est le Blues-Rock et, dans le genre, LITTLE FEAT excelle, propose du travail d’orfèvre. D’ailleurs, comment serait-il possible de résister à « Easy To Sleep », une compo entre Blues-Rock mélodique et Rock Sudiste qui s’avère addictive avec ses mélodies ensorceleuses, ses superbes textures de guitare, son solo raffiné, un Lowell George bien soutenu par des choeurs colorés qui contribuent à en faire un classique intemporel, hymnique. Ce n’est pas un hasard si ce titre a été repris plus tard par Bob WEIR et les BLACK CROWES. Dans la même veine, le mid-tempo « Got No Shadow », aussi rampant que mélodique, fait des merveilles avec ses mélodies feutrées qui rendent l’ensemble accrocheur, ainsi qu’un piano qui accompagne en finesse et le chant, les guitares. Le mélange Blues-Rock/Boogie-Rock fonctionne de manière redoutable sur « Tripe Face Boogie », un morceau jovial qui met en valeur guitares roots, un piano extraverti, se révèle accrocheur en diable, addictif au point que beaucoup auraient envie de se le repasser en boucle; « Teenage Nervous Breakdown », un morceau remuant, plein de peps avec un piano qui virevolte autant que la guitare, qui a de quoi gonfler à bloc, s’impose comme un formidable remède contre la dépression, est même carrément bandant; ou encore « Cat Fever », un mid-tempo chanté par Bill Payne (habituellenent préposé au piano, à l’orgue Hammond) et sur lequel piano et guitares se partagent l’espace sonore, dans lequel vient se greffer un solo ahurissant qui prend aux tripes et qui est, à mon sens,a ssez représentatif de ce que les 70’s ont produit de fabuleux au début des 70’s. LITTLE FEAT s’est également fendu d’une trouvaille intéressante avec « Texas Rose Café », un titre Classic-Rock aux accents sudistes qui commence comme une ballade, puis se fait plus épais, plus vigoureux, tient en haleine avec une basse qui donne le change pendant le solo de guitare à connotation psychédélique, de fréquents changements de rythme, de direction aussi sur le plan mélodique. Le Rock Sudiste installe résolument ses quartiers sur « Cold, Cold, Cold », un mid-tempo entrainant, très roots qui est porté par un Lowell George à fond dans son trip. Dans une pure veine Blues, la redoutable efficacité de LITTLE FEAT reste intacte, comme l’attestent « Sailin’ Shoes », un morceau lent avec un refrain gaillardement repris en choeurs, des couplets qui évoluent sur un rythme pépère et un ton intriguant, et « A Apolitical Blues », un Blues électrique renforcé par un piano Ragtime, un harmonica qui vient s’inviter à la fête pour le rendre plus copieux, plus appétissant et qui s’avère délicieusement rétro, même en 1972 (en passant, VAN HALEN a repris ce titre en 1988 sur son album OU812). 2 ballades viennent compléter cet album. « Willin’ « , avec ses accents sudistes et Country, fleure bon l’Amérique profonde, se révèle assez élégante, inspirée avec ses choeurs, ses guitares acoustiques et son piano qui occupent l’espace sonore. Quand à « Trouble », c’est une ballade terroir épurée, sans artifice qui navigue entre Folk et Country, s’avère apaisante, plaisante et sa courte durée fait qu’elle va à l’essentiel.

Avec Sailin’ Shoes, LITTLE FEAT s’est fendu d’un excellent second album. Celui-ci apparait comme étant plus abouti que son prédécesseur. Le groupe emmené par Lowell George a évolué, affirme davantage sa personnalité et les musiciens s’imposent comme d’excellents mélodistes. Si Sailin’ Shoes a manqué de peu d’entrer dans le Top album américain, il s’est imposé sur le long terme comme un potentiel classique intemporel du Classic-Rock américain, un de ses plus beaux joyaux. Il faut dire que LITTLE FEAT a accompli sur ce disque un quasi-sans faute. Il reste désormais à confirmer par la suite…

Tracklist:
1. Easy To Sleep
2. Cold, Cold, Cold
3. Trouble
4. Tripe Face Boogie
5. Willin’
6. A Apolitical Blues
7. Sailin’ Shoes
8. Teenage Nervous Breakdown
9. Got No Shadow
10. Cat Fever
11. Texas Rose Café

Line-up:
Lowell George (chant, guitare, harmonica, saxophone)
Bill Payne (orgue Hammond, chant, piano, accordéon)
Roy Estrada (basse)
Richie Hayward (batterie)

Label: Warner Bros.

Producteur: Ted Templeman