Alors que Chicago s’inscrit de plus en plus comme l’un des groupes Américain les plus populaires d’Amérique, ils créent l’événement en jouant à guichets fermés pendant une semaine au prestigieux Carnegie Hall de New York. Une première pour un groupe Rock. L’occasion était trop belle et huit concerts (six en soirée, deux en matinée) seront enregistrés. Une compilation de ceux-ci sortiront à la fin de l’année dans un coffret 4 LP. Pourtant, la majorité des membres du groupe étaient contre, peu satisfaits du son. Au final, après des débuts difficiles et des critiques mitigées Chicago At Carnegie Hall sera un nouveau gros succès commercial, et ce malgré son format imposant. Seul Bruce Springsteen fera mieux dix ans plus tard.

Si l’on se posera la question de savoir l’intérêt d’avoir gardé la longue intro où le groupe s’installe et s’accorde, on l’oublie une fois que « In The Country » commence, porté par la voix chaleureuse de Terry Kath. On comprend cependant assez vite pourquoi une partie du groupe n’a pas été très satisfaite du résultat. « Les cuivres sonnent comme des kazoos » dira James Pankow, mettant cela sur le compte de l’acoustique de Carnegie Hall, pas conçue pour la musique électrifiée. Si c’est peut-être un peu exagéré, il est clair que leur son est un peu étouffé et nasillard, en particulier celui du trombone (comme par hasard l’instrument de Pankow). Néanmoins, il n’est pas non plus désagréable d’entendre Chicago avec son aussi brut (raison sans doute pourquoi Robert Lamm le défendra), loin du côté lisse et dégoulinant qu’ils allaient commencer à adopter à la fin des années 70. Suivant une longue impro de Lamm au piano (soutenu en cours de route par Danny Seraphine), le tube « Does Anybody Really Know What Time It Is? » lance définitivement le live, enchaîné par d’autres extraits tout aussi satisfaisant de Chicago Transit Authority (dont un « South California Purple » prétexte à montrer la folle virtuosité de Terry Kath). L’excellent « Sing A Mean Tube Kid » viendra se taper l’incruste entre eux pour notre plus grand plaisir dans une version étirée et diablement funky. 

C’est ensuite la totalité de la suite « It Better End Soon » qui nous est présenté. Comme de bien entendu, bien que composée par Lamm, elle laisse la part belle à Kath, tant niveau du chant que de la guitare. Avec toutefois une partie destinée au joli solo de flute de Walter Parazaider. Ça repart ensuite en force avec une superbe version de « Introduction » (Terry Kath, encore), un « Mother » épique au possible et offrant à Pankow (surtout) mais aussi Parazaider et Loughnane l’occasion de briller. « Lowdown » est interprété dans une version bien plus mordante que la studio avant les trois premier chapitres (le dernier suivra un peu plus tard) de la « Travel Suite » dont « Motorboat To Mars », solo de batterie de Danny Seraphine. La suite « Ballet For A Girl In Buchannon » est également interprétée dans une version moins ampoulée que l’originale. Petite curiosité ensuite avec l’inédit « Song For Richard And His Friends », titre Jazz Rock n’hésitant pas à utiliser les dissonances et appelant, selon l’explication de Lamm, Richard Nixon à démissionner de son poste de président. On termine par deux des plus gros tubes du groupe, le classique « 25 Or 6 To 4 » et la reprise du Spencer Davis Group « I’m A Man » dans des versions qui sans tirer au génie sont tout à fait convaincantes. 

Malgré des petits défauts au dessus duquel il est facile de passer (un son pas extraordinaire – surtout côté cuivres -, les séquences d’accordage conservées), Chicago Live At Carnegie Hall est un bon témoignage de ce qu’était le groupe en ce temps là. Un groupe novateur, aventureux avec des musiciens de premier ordre. A son écoute, on se rend compte encore plus auquel point à cette époque Robert Lamm était le cerveau de Chicago et Terry Kath son arme de destruction massive. S’il n’est sans doute pas l’album le plus indispensable de leur discographie, il n’est certainement pas celui qu’il faudrait le plus éviter. Et de loin. A noter que l’intégralité des enregistrements sortira dans un coffret en 2021 pour les 50 ans. 

Tracklist:
CD1
1. In The Country
2. Fancy Colours
3. Does Anybody Really Know What Time It Is? (Free Form Intro)
4. Does Anybody Really Know What Time It Is?
5. South California Purples
6. Questions 67 And 68
7. Sing A Mean Tune Kid
8. Beginnings

CD2
1. It Better End Soon – 1st Movement
2. It Better End Soon – 2nd Movement (Flute Solo)
3. It Better End Soon – 3rd Movement (Guitar Solo)
4. It Better End Soon – 4th Movement (Preach)
5. It Better End Soon – 5th Movement
6. Introduction
7. Mother
8. Lowdown
9. Flight 602
10. Motorboat To Mars
11. Free
12. Where Do We Go From Here
23. I Don’t Want Your Money

CD3
1. Happy ‘Cause I’m Going Home
2. Make Me Smile (Ballet For A Girl In Buchannon)
3. So Much To Say, So Much To Give (Ballet For A Girl In Buchannon)
4. Anxiety’s Moment (Ballet For A Girl In Buchannon)
5. West Virginia Fantasies (Ballet For A Girl In Buchannon)
6. Colour My World (Ballet For A Girl In Buchannon)
7. To Be Free (Ballet For A Girl In Buchannon)
8. Now More Than Ever (Ballet For A Girl In Buchannon)
9. A Song For Richard And His Friends
10. 25 Or 6 To 4
12. I’m A Man

Musiciens:
Robert Lamm: Claviers, chant
Terry Kath: Guitare, chant
Peter Cetera: Basse, chant
Danny Seraphine: Batterie
James Pankow: Trombone
Walter Parazaider: Saxophone, flute, guitare
Lee Loughnane: Trompette

Production: James William Guercio