Tout commence lorsqu’après une tournée avec le Jimi Hendrix Experience, le groupe de Rock psychédélique de Houston The Moving Sidewalks, qui compte le guitariste et chanteur Billy Gibbons, devient un trio. Un changement de nom s’avère nécessaire. Inspirés par les bluesmen comme BB King et ZZ Hill, ils décident de s’appeler les ZZ King. Peu convaincus par la sonorité, Top remplacera rapidement King. L’un des noms de groupe les plus étranges et mémorables du Rock était né. Avec Bill Ham, producteur et compositeur de longue date, comme manager, le trio enregistre quelques titres. Mais Lanier Greig et Dan Mitchell, les deux autres rescapés des Moving Sidewalks finissent par jeter l’éponge. En cherchant des remplaçants, Gibbons tombe sur Frank Beard, un jeune batteur tout juste arrivé à Houston avec sa famille. Celui-ci admire le jeu de Gibbons et rêve de collaborer avec lui. Beard ne traîne pas à rejoindre ZZ Top.

Frank Beard jouait avec un bassiste nommé Dusty Hill et son frère Rocky dans des groupes depuis l’adolescence (The Warlocks qui deviendra avec l’évolution des styles musicaux American Blues). American Blues s’était séparé avec le départ d’un Dusty désabusé. Appelant son ancien co-équipé, Beard ne tarde pas à convaincre celui-ci de rejoindre la nouvelle formation du trio. Celui enregistre rapidement son premier album, candidement intitulé ZZ Top’s First Album, en 1971. Comme ce qui se fait alors en Angleterre, ZZ Top joue un Blues avec une sensibilité Rock qui le durcit. Mais ils le font avec leur âme du terroir américain, là où Cream, Led Zeppelin et les autres ont mis leur esprit anglais. Tournant sans cesse dans toutes les petites villes du Texas, ils sortent leur second album, Rio Grande Mud, en 1972, qui leur vaut une première reconnaissance avec le single « Francine ».

Ils élargissent leur terrain de jeu en participant à un grand festival Blues à Memphis et peu après, il y enregistrent Tres Hombres en 1973. Avec le succès de « La Grange » et la hausse de la qualité du son et des compositions, l’album se vent comme des petits pains et entre dans le top 10 américain. Le trio comprend qu’il a atteint un stade lorsque les Rolling Stones les invite à ouvrir pour eux pour leurs trois concerts à Hawaï. En revanche, la presse Rock qui ne voit qu’en eux un petit groupe de provinciaux, les snobe. Qu’importe, ZZ Top a déjà un nouveau succès avec le mi-live mi-studio Fandango! et le tube que sera « Tush ». Pour le défendre, Bill Ham vient avec une idée ambitieuse: le Worldwide Texas Tour. Assumant leur nationalité texane avant toute autre, celle-là même qui est regardée de haut par la presse, le groupe joue sur une scène ayant la forme de l’Etat, alors que des animaux tels qu’un bison, des vautours, des serpents à sonnette et autres apparaissent durant le concert. Une sorte d’Alice Cooper Show à la texane ou une version Rock du Wild West de Buffalo Bill.

Cette tournée pharaonique, pendant laquelle ils trouveront le temps d’enregistrer Tejas, fera beaucoup pour augmenter la popularité du groupe dans l’ensemble des Etats-Unis. Elle laissera également les musiciens épuisés après presque deux ans de concerts. Qui plus est, Beard a sombré dans la drogue. Le trio prend donc une pause de deux ans. Beard s’occupe de vaincre ses démons, Hill reprend contact avec la réalité en travaillant dans un aéroport et Gibbons part en Europe où il découvre le Punk et la médiation. De retour en 1979 avec un nouveau contrat avec la Warner, ZZ Top se retrouve non seulement avec des possibilités de diffusion agrandies mais aussi avec une image commerciale inattendue. Gibbons et Hill, sans se concerter, ont laissé pousser leur barbe au delà de la longueur conventionnelle durant leur pause. Voyant là le moyen de rendre immédiatement le groupe identifiable aux yeux du public, ils conserveront cette caractéristique, l’exacerberont et la rendront légendaire.

Cette nouvelle image s’accompagne d’un nouveau son puisqu’après Degüello en 1979, El Loco en 1981 les voit commencer à expérimenter au delà du Hard Blues texan qui les avait rendu populaires. Ils poussent le curseur encore plus loin en 1983 avec Eliminator qui bénéficie des débuts de MTV pour faire entrer le Hard Rock synthétique que joue à présent le trio dans les foyers américains par le biais d’une image cartoonesque à base de longues barbes, chorégraphies simplistes, voiture rétro et jolies filles. Ce mélange est de la dynamite et Eliminator devient un carton commercial faisant de ZZ Top l’un des groupes Rock les plus célèbres des années 80. Certains diront qu’ils sont allés trop loin ensuite en continuant à augmenter l’aspect synthétique sur Afterburner. Mais bien qu’un peu en dessous de celles d’Eliminator, les ventes resteront parmi les meilleures de la carrière du trio.

Revenant à un son un peu plus proche de celui d’Eliminator, Recycler marquera un certain recule des ventes. La formule continue à trouver son public (les musiciens apparaîtront même dans le dernier volet de Back To The Future) mais les ventes sont en dessous des deux précédents. Après un compilation qui termine leur contrat avec la Warner, Antenna en 1994 prouve que la formule est arrivée en bout de course. En 1996 Rhythmeen les voit abandonner les sons synthétiques pour revenir au format Hard Blues des débuts. Peu à peu ZZ Top va se faire plus rare dans ses sorties studios. XXX en 1999 et Mescalero en 2003 ne manqueront pas particulièrement les esprits et il faudra attendre 2012 et la collaboration avec Rick Rubin pour La Futura pour retrouver un nouvel album du trio. Entre temps, ils auront rejoint le Rock And Roll Hall Of Fame en 2004.

Sur scène, en revanche, le groupe continue d’être actif, même si certains spectateurs déploreront des prestations de moins en moins habitées. La mort inattendue de Dusty Hill en 2021 rappelle que ZZ Top n’avait connu aucun changement de musiciens en cinquante ans ininterrompues de carrière. Un record qui ne semble pas près d’être battu dans le monde du Rock. Si le bassiste et chanteur aurait auparavant enregistré toutes ses parties pour un nouvel album à la sortie encore inconnue, il est certain que la disparition d’un des côtés du triangle apportera un manque impossible à combler pour ce qui sera la fin de carrière du plus célèbre groupe du Texas.